n° 382 • 29 septembre 2025
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Édito
Étranges regards
Dominique Pasco & Romain Aubé
Notre modernité fournit un flot continu d’images – à la télévision, sur les réseaux sociaux, dans l’espace public, etc. – auquel chacun est exposé quotidiennement. Le champ visuel en est saturé. Cela permet-il pour autant de voir ? Cette question est centrale, car elle souligne ce que l’image et le voir cherchent à voiler, un point inquiétant, étrange, qui déstabilise : l’objet regard.
Lacan parle à ce propos de schize : le regard en tant qu’objet a est séparé de l’œil et « ne se présente à nous que sous la forme d’une étrange contingence, symbolique de ce que nous trouvons à l’horizon et comme butée de notre expérience, à savoir le manque constitutif de l’angoisse de la castration[1] ». Objet du désir, logé dans l’Autre ou dans les figures de la représentation, il y est « éludé ». Néanmoins, si cet objet est dévoilé, le sentiment d’étrangeté émerge et avec lui l’angoisse : « Au regard de l’Autre s’attache toujours une étrangeté. Le regard porte en lui et nourrit des phénomènes […] d’étrangeté inquiétante[2] ». Mise au jour par Freud, cette dimension d’inquiétante étrangeté est suscitée par cet objet du désir. Lire, extraire du malaise inhérent à la rencontre avec l’objet a un savoir, c’est le travail d’une analyse.
Ce numéro s’attache à interroger ce lien singulier entre le regard et l’inquiétante étrangeté à partir de souvenirs personnels de Freud, de l’interprétation cinématographique en la matière et de l’écueil de son traitement par le discours capitaliste. Les photographies de doubles fantomatiques de l’artiste dessinent en creux l’étrangeté qui troue l’image.
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- Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1973, p. 69-70.
- Miller J.-A., « D’un regard, l’étrangeté », La Cause du désir, n°102, juin 2019, p. 45.
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Jacques Lacan
« [L]’intérêt que le sujet prend à sa propre schize est lié à ce qui la détermine – à savoir, un objet privilégié, surgi de quelque séparation primitive, de quelque automutilation induite par l’approche même du réel, dont le nom, en notre algèbre, est objet a ».
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Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1973, p. 78.
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Le lieu du désir
Jeanne Joucla
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De ce surgissement du double dans le reflet de la vitre du wagon-lit, Freud ne dit pas qu’il est effrayé, mais qu’il ne le reconnaît pas. Cela renvoie à la différence entre frayeur et angoisse.
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De l’étrangeté du regard à l’amour
Laetitia Jodeau-Belle
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Il y a une proximité intime entre le regard et l’étrangeté.
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Un monde omnimontreur
Diego Martin Tagliaferri
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Si voir relève d’une simple capture imaginaire, regarder suppose déjà l’implication du désir, puisque cela suppose ce point aveugle que Lacan nomme objet a.
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L’artiste : Marie-Ange Guilleminot
Plasticienne, sculptrice, vidéaste et performeuse, Marie-Ange Guilleminot vit et travaille à Paris. Elle propose ici, quatre photogrammes extraits de son film, « Vivre à la Maison Horta », co-produit avec le soutien du Musée Horta, de la fondation Thalie et de Bozar – Palais des Beaux-Arts, Bruxelles. Son travail détourne les objets de leur fonction, souvent des textiles et souligne avant tout le caractère poétique du geste créateur, mis en valeur par les matériaux, la lumière, les lieux.
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