n° 387 • 17 novembre 2025
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Édito
La parole comme objet oral
Isabelle Orrado
Si l’expérience analytique nous apprend une chose, c’est bien la puissance de la parole. Elle peut blesser, réconforter, faire mal, enthousiasmer… Parfois, elle peut même aller jusqu’à marquer le corps sous les traits d’un symptôme, ou fixer le destin d’un parlêtre. Il nous faut aussi considérer que parler, ou son opposé se taire, procure un plaisir et son au-delà : une jouissance. Prenant appui sur la pulsion orale, Lacan avance que la bouche, « qui s’ouvre dans le registre de la pulsion », ne se satisfait pas de la nourriture, mais du « plaisir de la bouche[1]». Si nous interrogeons sa valeur à partir du dernier enseignement de Lacan, la parole peut alors se faire objet oral, non pas la parole comme vérité, mais la parole comme jouissance, apparole : « Là où ça parle, ça jouit, et ça sait rien.[2]»
Ce numéro de L’Hebdo-Blog nous conduit sur les traces de cette satisfaction, de ce qui palpite dans la parole et que l’enfant découvre lorsqu’il s’en saisit. Pour cela, il lui faudra traverser la menace de dévoration que l’oralisation du signifiant met en jeu. Lalangue se révèle alors dans sa dimension de matière sonore qui s’incorpore. C’est ce que visera à attraper une analyse, jusqu’à débusquer cette bouche qui se referme sur elle-même en approchant la densité maximale de certains silences en analyse, « instance pure de la pulsion orale, se refermant sur sa satisfaction[3]».
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[1]. Lacan J., Le Séminaire, livre XI, Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1973, p. 153. [2]. Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1975, p. 95.
[3]. Lacan J., Les Quatre Concepts…, op. cit., p. 164.
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Jacques Lacan
« Là où ça parle, ça jouit, et ça sait rien. »
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Lacan J., Le Séminaire, livre XX, Encore, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1975, p. 95.
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Tours et détours de l’objet oral dans la cure
Marie-Hélène Blancard
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Faire valoir la différence entre tacere (se taire) et silere élève le silence à la dignité de l’acte analytique.
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Le babil, voyage entre énonciation et lalangue
Ariane Fournier
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Nourrissage et énonciation sont intriqués, mais la direction de chacun de ces mouvements est inverse : alors que le nourrissage vient de l’autre, l’énonciation, qui s’appuie sur l’Autre, vient du sujet.
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Jouissance orale et objet voix
Katty Langelez-Stevens
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Donc la connexion inévitable entre les deux objets : voix et oral est au principe même de la construction de la défense autistique par le mutisme.
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L’artiste : Madely Schott
Madely Schott vit et travaille à Marseille. Artiste plasticienne et performeuse, elle développe une œuvre située entre geste, parole et matière. Sa pratique engage dessins, formes textiles, installations immersives et dispositifs participatifs, « au service d’une narration incarnée, d’une résistance poétique et de dynamiques collectives ». En 2025, elle présente Vénus Tour, une installation interactive au Château de Servières dans le cadre du Printemps de l’art contemporain. Ce projet monographique, centré sur la figure de la Vénus et ses réappropriations contemporaines, donne lieu à une formation spécifique en feutrage artisanal et prolonge une recherche sur le corps-mythe, le soin et la performativité textile.
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