Édito
Une base d’opération de la psychanalyse
Cécile Favreau de Rivals et Martine Versel
Le Centre Psychanalytique de Consultations et de Traitement (CPCT) fut inventé à une époque où s’imposait dans tous les champs de l’activité humaine le discours de l’évaluation, une quantification généralisée de l’existence de chacun. Du premier CPCT, créé à Paris en 2003, à ceux qui s’inscriront partout en Europe, il s’agit de répondre à l’effacement de la subjectivité par l’action lacanienne, à rebours des protocoles et de leurs catégories. Le parlêtre, qui parle avec son corps, n’est à nul autre comparable. Le CPCT est un lieu psychanalytique pour l’institution du sujet. Il reçoit des sujets en prise avec le malaise de la civilisation, ses impasses qui n’oblitèrent pas pour autant l’action lacanienne, qui tient à la structure même du discours analytique.
À l’heure où la parole s’inscrit dans le flux illimité des plateformes numériques et des agents conversationnels, la psychanalyse mise sur le tranchant de la coupure. Loin des pratiques de bavardage encouragées par les lieux d’écoute généralistes, le CPCT accueille ce qui, dans une parole, peut faire événement.
Dans un monde où le marché propose des réponses avant même que les questions ne soient formulées, le dispositif du CPCT réintroduit du temps, de l’adresse, et surtout un vide : ce réel qu’aucun algorithme ne peut traiter. La consultation y devient un lieu de rencontre avec le manque, donnant chance à un dire singulier d’émerger.
Si la psychanalyse ne guérit pas, elle déplace, avec à son horizon la promesse d’une nouvelle satisfaction et la possibilité d’invention d’un lien singulier.
Les contributions de ce numéro montrent que le CPCT demeure résolument une base opératoire de la psychanalyse telle que Lacan l’appelait de ses vœux.
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